Sophie Roze étudie d’abord l’histoiregéographie et l’histoire de l’Art à Toulouse avant de se tourner vers sa véritable passion : le cinéma d’animation. Elle rejoint l’école de La Poudrière à Bourg-lès-Valence. Elle réalise Les Escargots de Joseph puis L’oiseau cachalot et co-réalise également Neige avec Antoine Lanciaux. Ses films sont réalisés en stop motion, en marionnettes ou en papier découpé, ses techniques de prédilection. Elle travaille régulièrement aux studios Folimage et JPL Films. Elle est également illustratrice de livres pour enfants.
Après des études à l’école d’art appliqué de Lyon, Pierre-Luc Granjon intègre le studio Folimage en tant que modeleur. Il réalise des films en marionnettes : Petite Escapade, Le Château des autres et en papier découpé : L’Enfant sans bouche, Le Loup Blanc. Il co-écrit et co-réalise avec Antoine Lanciaux Les Quatre Saisons de Léon. Il réalise ensuite La Grosse Bête, puis Le chien en écran d’épingles. Il est premier assistant réalisateur de Wardi et co-réalisateur de Léo, la fabuleuse histoire de Léonard de Vinci. Il est également illustrateur et auteur de livres pour enfants.
Comment avez-vous eu l’idée d’associer vos deux films ?
Nous nous connaissons bien, nous partageons le même atelier et nous sommes très au courant de nos projets respectifs. Nous nous sommes rendu compte qu’il y avait des éléments communs : les deux histoires se passent dans une forêt, elles racontent, avec une certaine pudeur dans les sentiments exprimés, une histoire d’amitié entre des êtres habitués à la solitude. Tout en étant très différents, les deux films semblaient se répondre, il nous a paru évident qu’ils pourraient fonctionner très bien dans un même programme !
Dans vos deux histoires, vos personnages se lient d’amitié avec un « monstre » qui vivrait caché dans la forêt…
Le monstre est une figure traditionnelle des contes que l’on retrouve dans beaucoup d’histoires et de films. Elle est toujours intéressante à traiter, surtout si le monstre en question ne s’avère pas si monstrueux. Les nôtres se révèlent être bien inoffensifs, il n’y a pas de réel antagoniste dans nos films, la présence d’un « méchant » n’est pas toujours nécessaire pour raconter une histoire. Par contre, faire croire qu’il y a un monstre dans la forêt apporte une vraie tension narrative qu’il est plaisant de désamorcer par la suite. La petite créature des Bottes de la nuit est très solitaire, elle voit en Eliot un nouveau compagnon idéal pour arpenter la forêt qu’elle connaît parfaitement. Le monstre d’Une guitare à la mer est en réalité un capybara à la recherche de son ami le coati. Il se cache à la fois dans la forêt et sous l’eau car c’est un animal semi-aquatique.
L’imagination et la poésie occupent également une place très importante dans vos récits.
SR : J’aime qu’il se passe des choses inattendues dans les histoires que j’écris, que ce soit graphiquement ou bien à travers la mise en scène. J’aime m’éloigner du réalisme, proposer des chemins de traverse qui nous amènent vers de la poésie ou de la fantaisie.
PLG : Il y a un tas de manières de raconter une histoire et je crois que Sophie et moi tenons beaucoup à ce qu’elle soit riche en instants de pure contemplation, des moments suspendus. Dès le début de l’écriture, je souhaitais faire un film empreint de douceur et ces instants poétiques y participent. Il ne faut pas oublier le rôle de la forêt, pour moi c’est un lieu propice à la magie, au mystère et où il n’y a pas de limites à l’imagination.
Une guitare à la mer mêle des scènes en stop motion (animation image par image) et en papier découpé, pourquoi avez-vous choisi d’utiliser ces deux procédés ?
SR : J’ai choisi d’introduire des scènes en papier découpé pour marquer la différence entre la « réalité » vécue par la fouine et les rêves qu’elle fait. J’ai également traité en papier découpé la scène du castelet où le capybara raconte comment une tempête l’a obligé à quitter son pays. Le soufflet de son bandonéon s’ouvre comme un rideau de théâtre, ce qui accentue le côté « récit dans le récit ». Je voulais être sûre que les enfants comprennent bien la structure de l’histoire, qui alterne réalité/rêve/récit, et qu’ils·elles ne se sentent pas perdu·es, tout en gardant le côté stop motion.
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Les Bottes de la nuit a été réalisé avec l’écran d’épingles, comment avez-vous opté pour cette technique si particulière ?
PLG : J’ai eu la chance de participer à un atelier sur l’Épinette, le dernier écran d’épingles fabriqué par Alexeieff et Parker. Durant 3 jours, j’ai pu apprivoiser cet incroyable objet, puis le CNC nous a ensuite prêté l’écran pendant un mois. Durant ces semaines de travail, j’ai découvert combien l’écran donnait de la profondeur et une grande douceur à mes images, alors qu’il est fait en grande partie de métal. C’est un outil parfait pour travailler l’ombre et la lumière et c’était idéal pour un film qui se passe durant une nuit de pleine lune.
Retrouvez l’écran d’épingles dans notre article sur les outils pédagogiques du film UNE GUITARE À LA MER