Aurélie Faouen a participé au Prix Cinéma des Écoles avec sa classe de PS/MS de l’école maternelle Erlanger à Paris (75) et Emmanuel Delangle avec sa classe de CM2 de l’école Françoise Giroud à Saint-Herblain (44) dont il est également directeur.

Comment avez-vous décidé de participer au Prix Cinéma des Écoles ?

A.F : J’ai l’habitude de participer à différents dispositifs comme Les Incorruptibles ou Mon 1er cinéma. J’ai découvert le Prix grâce à un mail sur ma boîte académique ; j’ai vu que tout le monde pouvait s’inscrire facilement et accéder à divers outils très utiles pour mieux connaître et analyser les films. Je trouvais intéressant de faire réfléchir les élèves sur des supports visuels, de les amener à être plus actives et actifs lorsqu’ils et elles regardent un film, de leur faire décrire les actions et les personnages, tout comme nous le ferions avec un album. J’ai aussi apprécié la flexibilité laissée aux enseignantes et enseignants dans le choix des films, des dates de séances, et du cinéma le plus proche de l’école.

E.D : Notre cinéma de quartier, le Lutetia, nous a envoyé un courriel pour nous présenter le Prix en nous précisant que l’objectif était de valoriser la parole et le goût des élèves, de la maternelle au CM2. L’une des raisons principales de notre engagement a été le processus de vote. Nous avons aussi apprécié que les films en compétition soient récents. Le fait de ne pas être obligées et obligés d’assister à plus de deux projections a également été un point décisif : nous sommes une école de neuf classes et le prix des places est entièrement payé par la coopérative scolaire. Cela représente un budget très conséquent, financé uniquement par les dons des parents et les profits.

Comment avez-vous choisi les films parmi la sélection proposée ?

A.F : En regardant les bandes-annonces sur le site du Prix Cinéma des Écoles et en fonction des thèmes de la classe : l’automne pour *La colline aux cailloux* et Noël pour L’incroyable Noël de Shaun le mouton.

E.D : Chaque enseignant ou enseignante a choisi après avoir visionné les bandes-annonces. Par exemple, comme nous avions travaillé sur la vie de Léonard de Vinci et sur le château de Chambord, le film Léo, la fabuleuse histoire de Léonard de Vinci était l’occasion idéale d’approfondir le sujet.

L’intervenante Marion Truchaud présente l’atelier cinéma aux élèves de PS/MS

Comment avez-vous organisé les séances au cinéma ?

A.F : C’est très bien expliqué sur le site du Prix Cinéma des Écoles ! J’ai regardé quels cinémas proposaient les films qui m’intéressaient, puis je les ai contactés pour obtenir un devis et convenir d’une date. C’était l’occasion d’être en salle avec des élèves d’autres classes, et même d’une autre école.

E.D : J’ai organisé les séances en lien avec les bénévoles du cinéma. Nous avons la chance d’avoir un cinéma à côté de l’école, qui est accessible sans avoir besoin d’utiliser un transport véhiculé. Si nous n’avions pas été contraints par le budget, nous aurions aimé voir un troisième film.

Comment les élèves ont réagi pendant les projections ?

A.F : Certain·es découvraient le cinéma pour la première fois : l’idée d’être dans le noir, sur de grands fauteuils, les angoissait un peu. Pour les préparer, je leur ai projeté les bandes-annonces sur le TNI, les rideaux tirés. Je leur ai expliqué que la musique pourrait être un peu forte par moments et qu’il ne fallait pas hésiter à prévenir l’adulte le plus proche si cela les gênait.

J’ai pris beaucoup d’adultes accompagnateurs pour la première sortie afin de les rassurer, et tout s’est très bien passé. Tous·tes les élèves ont été captivé·es jusqu’au bout de la projection, dans un silence rythmé uniquement par des éclats de rire. Ils·elles étaient ravi·es d’y retourner et j’ai pu prendre moins d’accompagnant·es pour la seconde séance.

E.D : Les enfants ont été très réceptifs aux films, certain·es ont même pleuré pendant la séance de Sirocco et le royaume des courants d’air lorsque le personnage de Sirocco disparaît et que la petite fille Juliette pleure. Ce film a suscité du débat, car certain·es l’ont réellement aimé, alors que d’autres n’ont pas apprécié certains aspects, comme la façon de chanter du personnage de Selma.

Les élèves de PS/MS prennent les photos avec le logiciel d’animation image par image

Comment êtes-vous revenu·e sur les films après les projections ?

A.F : Les enfants racontaient, en dictée à l’adulte, les histoires des courts métrages, que j’intégrais dans les cahiers de vie pour les partager avec leurs parents. Ce n’était pas toujours facile pour elles·eux de distinguer les différents récits, mais c’était l’occasion de donner leur avis en évoquant leur moment préféré. Cela n’était pas toujours très clair pour des enfants de cet âge, mais c’était toujours intéressant à écouter Les élèves ont également adoré remplir les cahiers de bord, qui leur permettaient d’exprimer leurs ressentis et de garder une trace.

E.D : Nous faisions d’abord un retour écrit où les élèves racontaient leurs impressions, ce qu’ils·elles avaient aimé ou pas pour chaque film. Puis nous discutions des différents films en groupe-classe.

Comment s’est déroulée l’organisation du vote en classe ?

A.F : Pour préparer le vote de la meilleure affiche, nous avons décrit les affiches des films que nous n’avons pas vus et imaginé l’histoire, avant de regarder les bandes-annonces. J’ai ensuite imprimé les bulletins de vote pour chaque prix au format A3 et chacun·e a inscrit un bâton sous l’image du film choisi. Les enfants ont pris cette étape au sérieux et ne se sont pas laissés influencer par les votes de leurs camarades. Certain·es étaient déçu·es que le résultat du scrutin ne corresponde pas à leur choix mais ont bien compris la règle.

E.D : Par souci d’écologie, nous avons affiché les bulletins de vote sur le TBI, puis chacun·e des élèves notait sur un petit papier le nom du film ou du personnage pour lequel il·elle votait. Un élève a ensuite dépouillé les bulletins pendant qu’un autre comptabilisait les résultats. Lors du vote pour le personnage préféré, deux personnages se sont retrouvés à égalité. Nous avons donc procédé à un nouveau vote pour pouvoir les départager.

Les élèves de CM2 positionnent les personnages qu’ils·elles ont fabriqué pour la scène de la classe

Qu’est-ce que vos élèves ont le plus apprécié dans le dispositif ?

A.F : Ils·elles ont adoré sortir de l’école pour aller au cinéma – l’excitation était palpable dès le trajet -, regarder les films pour découvrir des histoires amusantes et touchantes, ainsi que donner leur avis. C’était important de découvrir qu’on ne peut pas tout aimer : il est permis de ne pas avoir aimé l’histoire en expliquant, si possible, pour quelles raisons.

E.D : Les élèves se sont beaucoup questionné·es sur les films, l’importance de l’affiche et le rôle des personnages. Le fait de pouvoir voter était également très appréciable pour elles·eux. Les enfants avaient déjà procédé à des votes en classe pour les élections des délégué·es, des conseils d’élèves ou les petits champions de la lecture ; cela leur plaît à chaque fois.

Avez-vous constaté une évolution dans leur rapport aux films ?

A.F : Les élèves peuvent avoir tendance à regarder les images de manière passive, sans réfléchir. Le fait d’indiquer en amont de la projection mes attentes (description des personnages, narration de l’histoire, états mentaux des personnages) leur a permis de regarder les films en étant actif·ve, avec une mission en tête. Cette attitude est importante à adopter pour développer peu à peu l’esprit critique devant les images véhiculées par les écrans.

E.D : Beaucoup d’élèves ont l’habitude de regarder des films à la maison, à la télévision ou sur un module portable et de les commenter en direct. L’expérience collective qui consiste à regarder un film dans un lieu public, avec des règles précises, est un apprentissage important, car il faut reporter ses commentaires à plus tard. Cela permet de faire mûrir son point de vue pour échanger avec ses camarades sur le trajet du retour, puis en classe.

Les élèves de CM2 suivent en temps réel le tournage sur le TBI.

Comment s’est déroulé l’atelier cinéma pour vos élèves ?

A.F : Nous avons convenu avec Marion, l’intervenante, de fabriquer en amont les décors avec les élèves. Nous avons essayé de nous remémorer les différents personnages et histoires, ainsi que toutes les étapes du prix : la préparation aux films, les projections, les cahiers de bord et le vote. Le jour J, Marion leur a montré comment fonctionnaient la caméra et le logiciel. Les élèves, par groupes de trois, ont déplacé les personnages, pris les photos avec l’ordinateur et regardé les scènes au fur et à mesure. Nous avons ensuite enregistré les voix des enfants. Ils·elles ont adoré découvrir le petit film monté par Marion, cela leur a laissé un beau souvenir ! Nous remercions les organisatrices de ce prix pour ces belles découvertes, pour les outils et pour cet atelier.

E.D : Les élèves étaient très motivé·es par l’atelier ! L’intervenante nous a proposé de préparer en amont des décors en nous indiquant les dimensions ; certain·es en ont préparé à la maison et nous les avons tous utilisés. Dans le cadre d’un travail en géométrie, nous avions appris à fabriquer des cubes tressés. Les personnages que nous avons animés pour l’atelier étaient donc faits de cubes en papier élaborés en classe. Il nous a fallu deux heures rien que pour réaliser 40 secondes d’animation image par image. On s’est dit qu’il devait y avoir un travail monumental pour faire un long métrage d’animation !

Allez-vous participer à nouveau cette année ?

A.F : J’aimerais beaucoup car j’ai été séduite par la simplicité de l’inscription, la flexibilité du dispositif, le choix des films et la qualité des propositions pédagogiques. Je trouve que c’est important d’éveiller les élèves à des films de qualité.

E.D : Oui, très certainement. L’envie ne manque pas, en tout cas. D’autant plus que nous avons été très chanceux de gagner l’atelier cinéma !

Les élèves de PS/MS préparent les intertitres pour leur film